En balade dans Belley

J’ai été invitée par deux super professeures du Lycée du Bugey à participer au projet Egalité : une réalité ? Leur demande était de préparer une réflexion sur l’égalité des mémoires dans Belley. Je leur ai proposé de partir avec les lycéen-nes à la découverte de la ville et de réfléchir ensemble à :

  • Qu’est ce qu’on voit du passé de Belley en s’y baladant ?
  • Quelles traces ont été volontairement conservées et pourquoi ?

  • Quelles traces ont presque disparu aujourd’hui ?

Je ne suis pas historienne mais j’ai décidé de me lancer avec les informations qu’on avait réunies dans le cadre du projet Bugey-Monde. Si vous voyez des erreurs, n’hésitez pas à m’écrire à collectif@entre-autres.org

Première étape devant le lycée. Nous sommes rue du 5e R.T.M. Le 5e R.T.M. ?

Le 5e R.T.M. était un régiment d’infanterie formé de combattants marocains, mais aussi algériens et syriens. Créé en 1920, il a combattu dans les guerres coloniales (Maroc, Liban-Syrie, Indochine) et dans la Seconde Guerre mondiale. Il est dissous en 1965. Ahmed Ben Bella qui deviendra le premier président de la république algérienne, a combattu dans ses rangs.

Nous descendons vers le rond point de l’avenue Charles de Gaulle par la rue Pablo Picasso.

Devant le rond-point, nous voyons l'ancienne gare de Belley.

Elle était sur la ligne Pressins-Virieu-le-Grand lancée en 1880. La destruction d’un pont au dessus du Rhône en 1940 met fin au trafic des voyageurs. Le trafic des marchandises continue jusqu’en 2017. La ligne est aujourd’hui abandonnée.

Nous voyons aussi la friche où se dressait encore il y a quelques semaines le dernier bâtiment du Tanneur et le nouveau collège sur les terres duquel il y avait des baraques pour loger les travailleur-ses. D’ailleurs la rue du collège s’appelle Guillaume Gianinetto, en hommage à son directeur.

 

Le « Tanneur et Cie » a été fondé en 1898. L’entreprise devient célèbre avec ses porte-monnaie en cuir sans coutures, primés lors de l’Exposition universelle de 1900. Elle fournie l’armée française pendant la Première Guerre mondiale. Elle compte jusqu’à 1000 employé-e-s. L’entreprise est allée chercher certain-e-s d’entre eux au Portugal et au Maroc, notamment pour travailler à la tannerie. Il ne reste aujourd’hui du Tanneur à Belley qu’un magasin.

Nous remontons l’avenue Brillat Savarin.

Nous nous arrêtons rue du 11e régiment des Zouaves devant le quartier du Clos Morcel.

Le quartier du Clos Morcel occupe aujourd’hui un parc qui appartenait à la famille Morcel, d’où son nom. Il a été créé dans les années 70, avec l’eau courante et le chauffage, ce qui rendait ses appartements plus confortables que d’autres du centre ville.

Les Zouaves étaient des unités françaises d’infanterie de l’Armée d’Afrique, créée en 1830 en Algérie. Ces unités prennent le nom d’une tribu kabyle « zouaoua », réputée au combat. Le 11e régiment a été formé en France et combat pendant la Seconde guerre mondiale. L’Armée d’Afrique est dissoute en 1962.

Nous rentrons à l'intersection avec la rue Sainte-Marie dans le jardin du Palais épiscopal. ​

Nous apercevons la « Vieille-Porte » qui était plutôt qu’une porte un passage pour les moniales, construit après 1695.

Nous pouvons ainsi voir les monuments qui rappellent le pouvoir historique de l’Eglise catholique à Belley :

  • la cathédrale de Belley, dont la première mention date de 722 et qui a été construite et reconstruite jusqu’en 1853. Son emplacement a été celui d’un temple dédié à Cybèle, déesse phrygienne (dans la Turquie actuelle), adopté par les Grecs puis par les Romains, personnifiant la nature.

  • le Palais épiscopal, construit pour accueillir les évêques au XVIIIe siècle.

Nous voyons aussi les stèles funéraires et les colonnes romaines qui y sont conservées.

Nous descendons devant le Palais épiscopal, prenons la rue des Cordeliers jusqu'à tourner rue Lamartine pour nous retrouver devant l'Office de tourisme.

Il y a là la statue de Jean-Anthelme Brillat Savarin, homme politique (maire de Belley et député en 1789) et gastronome. Destitué en 1792, il fuit en Suisse, à Londres, au Pays-Bas puis aux Etats-Unis où il donne des leçons de français et joue du violon. Il est l’auteur de la Physiologie du goût.

Nous sommes devant l’hôtel des Ducs de Savoie construit au début du XVe siècle. C’était le siège de la Justice. La Maison de Savoie a marqué l’histoire de Belley à partir du XIe siècle. C’est l’occasion de rappeler que le Bugey a été rattachée au royaume de France sous Henri IV en 1601 et la Savoie en 1860 (soit plus de 200 ans après la Martinique!).

Nous prenons la rue du Palais et traversons la Place de la Victoire.

Notre dernier arrêt a lieu devant le Monument aux Morts.

Il date de 1920. Il fait partie des très nombreux monuments aux morts créés suite à la première guerre mondiale, dont les pertes ont été massives (1,4 millions de morts pour une population de 40 millions d’habitants). Le premier a été créé à Peyrieu !

Il jouxte un monument en souvenir des 44 enfants d’Izieu, réfugiés dans une bâtisse transformée en colonie de vacances pendant la Seconde Guerre mondiale. Avec six encadrants, ils ont été déportés à la suite d’une rafle de la Gestapo, en 1944, et furent exterminés à Auschwitz et à Tallinn, en Estonie.

Il est aussi en face de l’ancien hôtel -restaurant Pernollet qui a existé entre et 1984 et participé à la renommée de Belley, avec comme client-es Gertrude Stein, écrivaine et mécène, qui a ensuite vécu entre Paris et Billignin, Haroun Tazieff vulcanologue, Paul-Emile Victor explorateur, et les peintres Pablo Picasso et Francis Picabia. François Pernollet fut l’un des trois premiers chefs à obtenir 3 étoiles au guide Michelin.

Gertrude Stein a d’ailleurs donné son nom à l’une des trois seules rue de Belley qui porte le nom d’une femme avec Josette Deleruelle organiste et Lucie Aubrac, résistante (nom de rue qu’elle partage avec son mari).

On rentre au Lycée en passant devant l’internat renommé Gaston Lavoille, en l’honneur de ce proviseur qui, pendant le Seconde Guerre mondiale, a accueilli des adolescents de la colonie d’Izieu.

Merci aux deux professeures pour leur confiance, leur inventivité et leur engagement pour faire vivre ce projet,

Merci aux lycéen-nes pour leur écoute,

Merci à ABIS et à Bugey-Sud pour leur aide.

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